Le concile de Laodicée a limité les Évangiles canoniques au nombre de quatre. Cependant, nombreux sont les textes apocryphes qui content, avec parfois un regard bien différent, l’histoire du Christ. Tel est le cas de l’Évangile selon Kévin, où l’on apprend par la même occasion l’existence de cet apôtre. Voici, dans les grandes lignes, la substance de son récit.
Kévin Ceukon (l'orthographe de son nom varie selon les traductions) était d’une patente candeur avant que d'être un sage. Humble paysan, il cultivait le navet dans la banlieue ouest de Jérusalem. Mais, puisque tout n’était qu’épreuve, il ne parvenait point à récolter les fruits de ses semences. Un jour, il vit un homme déambuler dans son champ. Alors, Kévin l’invectiva :
- Hey donc ? Qu’est qu’y vient branler sur mes platebandes lui ? Vire don’ de ma culture grand couillon !
- Bonjour mon frère, je suis l’Agneau de Dieu. Que cherches-tu ?
- Certainement pas à faire de l’élevage ! Oust !
- Mon frère, tes navets se meurent, se fanent et s’étiolent. Avant de semer, sépare le bon grain de l’ivraie. Après avoir semé, arrose ta plantation.
Kévin prudent, à l’esprit grégaire, mais pas agraire, mit en œuvre les conseils de l’étranger et constata la salvation de son potager. Il ne sut compter le nombre de racines qu’il put tirer. Quand celui-ci reparut, l’autre se jeta à ses pieds sandalés.
- Seigneur Messie ! Aurais-je su ! Éloigne-toi de moi, car je suis un homme trop miséreux pour baiser tes saintes chausses.
- Sois sans crainte. Désormais, c’est sur la racine des hommes que tu tireras. Deviens mon apôtre.
- Certes oui… Mais que faut-il que je t’apôtre ?
- Apporte-moi ton écoute, Kévin, fils de Zépétée, suis mon enseignement et répands-le sur la terre comme tes graines aux vents.
C’est ainsi que Kévin ne quitta plus son sauveur et qu’il assista, avec la plus grande admiration, à de nombreux miracles.
Un jour, le prophète s’adressa à son fidèle ami :
- Kévin mon frère, comprends-tu le message que je veux porter au monde ?
- Pas un traître verbe, sir.
- Kévin mon frère, tu parles d’or. Je vais te confier une mission qui t’éclairera sur le sens de la vie. Justement, l’une de mes brebis m’a trahi, et, pour quelques deniers, a provoqué ma mort prochaine. En vérité je te le dis, va au travers de mes disciples, et apprends.
L’apôtre Kévin, tremblant d’avoir à tendre l’autre joue, s’en alla questionner les zélateurs. Il trouva d’abord le prince de tous apôtres.
- Simon Pierre, le pécheur, prêcheur, pêcheur, dépêche : t’es de mèche ? Quelle diablerie auras-tu commise ?
- Kévin mon frère… Satisfaisant mes appétits gloutons j’ai tripoté force nichons… Mais… toucher nichons, poitrails, paires de fesses, est-ce un péché ?
- Non ! Non… Vous leur fîtes – seigneur ! – en les palpant, beaucoup d’honneur. Allons donc, cesse là ta confesse, car tu n’es point le vilain que je course.
Ainsi, Kévin s’en retourna vers un second apôtre.
- Jean mon frère, l’aigle au calice, tu es pensif. Sont-ce là des sournoiseries qui souillent ta conscience ?
- Kévin mon frère, il me faut le dire pour soulager mon âme. Voilà un temps déjà que je troque les gobelets d’eau du Salvator Mundi par des coupes de vin… Et cela dans son céleste dos. Que ne rigolons nous pas à ses dépens, quand, ivre de sa coupe pleine, il attribue le fait à son père le thaumaturge. Est-ce un péché ?
- Non ! Non… Loin de moi, à ces mots, de crier haro sur tes gobelets. J’ignorais ce coup, mais c’est plus clair. Et puis il prouva, par ses harengs, qu’il pouvait multiplier ce dévoué animal. Enfin ton jeu n’a rien changé à nos affaires, et tel n’est pas le sortilège qu’il m’appartient de percer.
Ainsi, frère Kevin s’en retourna vers un troisième apôtre.
- Mathieu mon frère, toi, percepteur de ton état, de quel forfait es-tu comptable ? Mets-toi donc à table !
- Kévin vieux frère, maintenant je me dénonce. Je pratique, chaque jour que Dieu fait, le péché d’Onan…
- …Oh non ?
- Oh si… Et je donne à mes compagnons de chaleureuses poignées d’une main souillée que je n’ai point lavée… Est-ce un péché ?
- Non ! Non… Mais vous nous ferriez – dans l’heure ! – en les lavant, beaucoup d’honneur. Je te remercie pour cet aveu difficile, mais ce sont d’autres méfaits qui m’animent. Je te prie d’accepter ce simple signe de la main en guise d’adieu.
Ainsi, frère Kevin s’en retourna vers un dernier apôtre.
- Judas Iscariote mon frère, pourquoi est-tu là, las, à lassé ces sandales sans cesser d’être las ?
- Kévin mon frère, ces chausses que je lasse sont neuves. Je les ai achetées ce matin au marché pour trente deniers. Une belle affaire, j’ai négocié comme un roi de Judée. Mais en vérité, faire une telle prise à un prix si bas me grise. Est-ce un péché ?
- Non ! Non… Ces souliers valent cent sous ! Et toi, sans soucis, tu les as soustraits à l’épicier pour soixante-dix sous de moins ! C’est fou !
Kévin revient près de son maître pour lui conter son épopée. Nombre de ses apôtres ont une noirceur à l’âme, mais enfin ! Ils ne sont que des hommes. L’un d’eux, cependant, à l’exception d’un gout prononcé pour la chose mercantile, aurait peu à faire en confession. Serait-ce un saint ? C’est alors fièrement qu’il annonça au messie qu’il pouvait mettre ses doutes aux clous, et que celui-ci lui donna le nom de Kévin Ceukon (verset 16 : 18 « Et moi je dis qu’il est con, et sur ce con je ne bâtirais pas mon église »).
Et on se demande encore pourquoi cet Évangile n’est pas canon !
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Ainsi va la Bonne Nouvelle ! L’Évangile apocryphe selon Kévin, propose un récit original sur les apôtres et la vie du Christ. Entre humour et références bibliques, cette parodie grivoise offre un regard inédit sur la religion, les miracles, les disciples et l’histoire chrétienne.
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