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Dans une prison, un prisonnier est assis sur un étron

          Ah ! Ce que j’aime rendre visite à mon vieil ami l’inspecteur Lecoq ! Il a toujours en stock une de ses vieilles affaires, comme seul un bleu peut vous en servir. Ce jour-là, on se retrouve au MacCouye, un pilier des pubs de la vieille ville. Lorsque je pousse la double porte battante, vitrée à barres de cuivre, je mets un peu de temps avant de l’apercevoir, enfoncé dans un fauteuil club, rognant le foyer de sa old pipe en écume, et maudissant le ciel qu’elle soit toujours aussi crade.

- Mon vieux Lecoq ! Quel temps dehors…

- Arf, c’est sûrement la flotte qui a foiré ma pipe ! Ou les métèques…

Je réponds à son rire gras par un sourire pincé et une réprobation intérieure, sans perdre de vue ma soif d’histoires policières. Je tente une perche :

- Vous avez vu, inspecteur, il y a de sacrés loustics au comptoir, des mines peu affûtées.

- Là, vous dites vrai, et vous n’êtes pas sans savoir qu’en quarante ans de boutique, les mecs louches, je sais les reconnaître. Tenez, le type qui se tient mollement au comptoir, le froc à la commissure anale et l’air paumé à ne pas savoir comment tenir la chopine. Eh bien, figurez-vous que le mec avait pour habitude de montrer ses joyaux aux petits héritiers, si vous voyez ce que je veux dire.

- Vous voulez dire… un désaxé ?

- Tout juste ! Un fondu du ciboulot, à qui il manque deux heures de cuisson !

- Ça fait froid dans le dos, inspecteur, un sale type, comme qui dirait.

- Vous visez juste aujourd’hui. Si j’avais vingt ans de moins, je vous ferais la tournée des grands-ducs ! Mais je vais me contenter de vous exposer une sombre affaire. Écoutez bien la leçon que je m’apprête à vous conter, et vous sortirez de ce pub moins candide que vous n’y êtes entré !

- Alors là, je vous écoute, mon ami !

- Bon, évidemment, ça commence classiquement. Je suis appelé sur un « différend familiale », me dit le central. Sauf que moi, j’ai un traducteur, et je sais que si je trouve Madame à côté de son gazomètre GRDF, je vais avoir du mal à savoir à qui m’adresser, vous voyez ?

- Pas tellement, non.

- Attendez, ça va se préciser. Donc, j’arrive avec mes gars. Là, je vois Josiane qui sort, paniquée. Elle tombe dans nos bras, la gueule comme un compteur à gaz ! Le type lui avait bombé la guérite façon extincteur dans Irréversible.

- C’est beaucoup plus clair, en effet ! - dis-je en déglutissant d’effroi.

- Bon, là-dessus, le type sort et il nous sucre les fraises. Alors, on parle classiquement de crise d’hystérie. Il y a un ou deux noms d’oiseaux exotiques qui sortent, et puis on finit par le charger dans le panier à salade. Une fois au poste, le mec nous raconte tout un tas de conneries. Mais la petite dame, elle, elle nous dit que Monsieur n’a pas tous les codes de la séduction.

- Ça me paraît assez évident.

- Non, non, vous n’y êtes pas, mon vieux. Le type, en fait, il voulait mettre en pratique le devoir de solidarité entre époux, m’voyez. Alors ce con, il s’approche de bobonne qui récure les plats à tarte, il se colle à son cul et…

- Et il la pelote sans sommation ?

- Pire ! Il formule son envie, mais pas dans les termes les plus élégants. Il lui dit, comme ça : « Soulage-moi, vieille truie ».

- Vieille truie ?

- Vieille truie.

- Mais, s’est-elle exécutée, mon vieux Lecoq ?

- Vous pensez bien que, si on en est là, c’est que la demoiselle a voulu jouer les Sitting Bull à Little Bighorn. Bon, alors, elle lui dit, comme ça, d’aller se triturer les jumelles en solitaire.

- Et alors ?

- Eh bien, voyons, mon garçon, votre mère ne vous a pas refilé le don de prescience, c’est moi qui vous le dis ! Eh bien, elle s’est fait arranger la toile, mon petit père, et façon Marcel Cerdan !

- Quel sale type…

- Ah ! Et voilà précisément où je veux en venir. Évidemment, nous, à la brigade, on se dit, comme vous, c’est un sale type, un lubrique. Mais figurez-vous que nous n’étions pas au bout de nos peines. Tenez, le mec commence à tambouriner à la porte, façon Beethoven, pour nous signifier son inconfort.

- Que de références, mon cher Lecoq.

- Ouais, ouais, bah, en voici une autre de référence ! Alors, on l’envoie un peu chier, mais il insiste et il dit : « J’ai fait un truc vraiment pas beau à voir, les gars ». Là-dessus, j’ai un mauvais pressentiment, du genre mystique.

- Paranormal ? - L’inspecteur étouffe un rire.

- T’ah ! Dans le mille. On ouvre le cachot, et là, je peux vous dire que ce qu’on découvre n’a rien de fantomatique ! Un étron colossal, dispendieux, posé là, comme un seul homme !

- Au milieu de la geôle ?

- Non, mon cher, apprenez que toute taule qui se respecte est équipée comme suit : de jolies chiottes à la turque posées contre le mur. Oui, mais voilà, entre ledit bassin de chiottes, réceptacle à immondices, et le mur, il y a un petit espace, un joli trottoir carrelé. Et le type en question, il a commis une erreur de débutant.

- Laquelle, Lecoq ? Je trépigne !

- Tout doux. La faute est simple, les conséquences sont abyssales. Le bonhomme, un peu en embonpoint, était infoutu de se tenir accroupi au-dessus du goulet. Alors, il s’est appuyé contre le mur, et, de fait, nous a axé son anus béant pile sur l’espace entre les chiottes. Fatalement, le rejeton du gueuleton est venu s’écraser sur la faïence.

- Dur.

- Si l’histoire s’arrêtait là, encore, mais non ! Écoutez plutôt : nous, un peu sous le choc, mais pas cabochards pour autant, on lui ramène un seau d’eau chaude avec du détergent. Comme ça, le type, il a juste à foutre une grande rincée sur son méfait, et toute la famille colombin partira en aller simple, vous comprenez ?

- Je vais faire une pause dans ma bière, moi.

- Forcément. Et c’est là notre erreur : on ne lui impose pas le mode d’emploi, qui nous paraît assez évident. Eh bien, le gars, on le voit s’accroupir devant sa création et mettre les mains en triangle, en ramasse-neige ! Et je préfère vous dire qu’on était en plein été. Nous, on regarde la scène, stupéfaits, avec les collègues. Le mec enserre le merdaillon de ses mains et racle la saloperie jusqu’à la faire tomber dans le trou.

- Mais n’avait-il pas vu le seau ?

- Attendez ! Le type se retrouve donc avec les mains pleines de merde, et là, il se penche vers le seau et se récure les pognes, façon raton laveur, avec la flotte ! On ne savait plus que dire.

- Je crois que je vais vomir, mon bon Lecoq…

- Ne vous donnez pas cette peine, mon garçon. Tout ça pour vous délivrer le message suivant : moi, je pensais que, dans ce monde, il y avait deux catégories de sales types : le sale type médiocre, lubrique, le salopard, l’irrécupérable ; et puis, le sale type dégueulasse, le cradingue, celui qui se bouffe les crottes de nez et qui se sniffe la sueur des baloches !

- Et, ce n’est pas le cas ?

- Si, si, seulement, ce jour-là, j’ai compris que certains connards cochaient aisément les deux définitions !

- Ah, ça ! Sacré Lecoq !

Vous avez aimé ?

Ainsi sont les sales types ! Dans le pub MacCouye de la vieille ville, l’inspecteur Lecoq, pipe en écume à la main, disserte sur eux à partir d’une affaire policière sordide. Entre loubards, différend familial et scène de crime, son récit policier authentique mêle humour, frissons et étrons.

Si vous avez aimé cette anecdote policière, n’hésitez pas à :

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